Un bref instant d’assoupissement suffit pour qu’elle perde le contrôle de son 4X4 qui quitta la route et plongea dans un ravin profond, terminant sa course contre un sapin quelque 12 mètres plus bas. A l’arrière de la voiture se trouvaient ses deux enfants : Lexi, une gamine de 5 ans et son petit frère Peter, âgé de seulement 10 semaines, tous les deux bien harnachés dans leurs sièges.

La petite fille se réveilla en entendant les pleurs de son frère. Par-dessus le dossier, elle découvrit alors sa maman qui ne bougeait plus.

Tout espoir de salut reposait sur une fillette de 5 ans

Malgré des douleurs au cou, Lexi se força à se tourner vers la lunette arrière de la voiture, la seule qui laissait entrer un peu de lumière, les autres étant cachées par les différents air-bags déclenchés lors du choc. Le spectacle n’était guère rassurant : une falaise abrupte, des rochers et quelques arbres, et vers le bas, elle découvrit la pente raide qui continuait aussi loin qu’elle puisse voir.

Dans cette situation dramatique, tout espoir de salut reposait sur cette enfant de 5 ans.

Le matin de ce 8 juin 2015, Angela Shymanski avait quitté les environs de Calgary, au centre de la province d’Alberta à l’ouest du Canada pour un voyage de quelque 800 km jusqu’à son domicile à Prince George, en Colombie Britannique. 

Ce n’était pas la première fois que cette femme de 28 ans, professeur de natation, parcourait une telle distance, toute seule au volant. Mais ce 8 juin, elle était bien fatiguée. Elle avait déjà manqué un premier embranchement mais avait décidé de poursuivre par une autre route, légèrement plus longue mais dans un joli paysage traversant le Parc National Jasper.

Seulement, ce jour-là, des travaux sur la route avaient causé beaucoup de ralentissements, ce qui avait perturbé le bébé qui s’était mis à pleurer. Pour le calmer, Angela avait mis de la musique pour enfants, et bientôt ce fut le calme complet. La zone des travaux dépassée, Angela put enfin accélérer, mais la chaleur du soleil et la musique douce finirent par l’assoupir. Elle ouvrit en grand sa fenêtre pour se maintenir éveillée tout en cherchant une aire de repos pour s’arrêter. Cependant, sans qu’elle s’en rende compte, ses paupières se fermèrent, un bref instant, suffisant toutefois pour qu’elle perde le contrôle de son véhicule qui quitta la route, dévalant la pente raide pour s’encastrer dans un sapin qui, heureusement, arrêta sa chute.

«Qu’aurait fait maman, si elle était éveillée ?»

A son réveil, la petite Lexi appela en vain sa mère, il n’y eut aucune réponse. Elle étendit sa main pour apaiser son petit frère qui hurlait à son côté. Le siège du bébé s’était détaché dans le crash et s’était retourné, laissant le garçon la tête en bas.

Lorsqu’elle réalisa que sa mère était inconsciente et qu’elle ne pourrait donc rien faire pour les sauver, Lexi comprit que c’était à elle de prendre les choses en main. Heureusement que dans la famille Shymanski, on avait pris soin de préparer cette toute petite fille à des situations d’urgence. Et dans cette voiture accidentée, Lexi se demanda d’abord : «Qu’aurait fait maman, si elle était éveillée ? Elle m’aurait certainement demandé d’aller chercher du secours…»

Elle réussit à se détacher de son harnais à 5 attaches et tenta de se frayer un chemin jusqu’à la portière. Celle-ci était coincée par le choc, et il fallut que la gamine se tourne sur le côté et tape de toutes ses forces avec ses pieds pour qu’elle s’ouvre. Une fois dehors, il restait le plus difficile: remonter jusqu’à la route cette pente escarpée que plus d’un adulte aurait du mal à escalader sans l’aide d’une corde. Lexi avait en outre perdu ses sandales dans le choc et ce fut donc pieds nus qu’elle se mit à grimper d’un rocher à un autre, assurant ses prises comme elle avait un peu appris à le faire dans une salle d’escalade. Mais ici, elle n’était pas attachée à une corde, et le moindre faux pas pourrait avoir des conséquences dramatiques. Toute tournée vers le but, elle avança, n’écoutant que son courage jusqu’à ce qu’elle arrive au bord de la route, où elle se mit à sauter et à agiter ses bras pour attirer l’attention des passants.

Une médaille bien méritée

Et c’est là que Loni et Jeremiah Jirik avec leurs trois enfants, soudain, découvrirent cette petite fille, pieds nus, qui leur fit signe de s’arrêter.  

«Au secours ! cria Lexi, ma maman a besoin d’aide.»

«Mais où est donc ta maman ?», demanda Jeremiah ne voyant personne ni aucune trace d’un accident. Lexi montra le bas-côté et il fallut vraiment s’approcher de la pente pour découvrir, dans le ravin, la voiture encastrée dans le sapin.

Dévalant la pente à toute vitesse, Jeremiah découvrit alors Angela Shymanski qui commençait à se réveiller. Il s’occupa d’abord du bébé, le détachant de son siège et le montant jusqu’à la route où il le confia à son épouse.

A ce moment, une seconde voiture s’arrêta. C’était un ancien pompier. Ensemble, les deux hommes descendirent jusqu’au 4X4. Voyant l’état de la jeune femme au volant, ils comprirent qu’il ne fallait pas qu’ils essaient tout seuls de l’extraire mais appeler les secours. Il fallut finalement l’intervention d’un hélicoptère pour l’évacuer vers l’hôpital d’Edminton où elle dut rester 19 jours pour soigner ses nombreuses blessures: fractures dans le cou et le haut du dos, des côtes cassées, le foie gravement endommagé ainsi que d’autres blessures internes nécessitant, entre autres, l’ablation de la rate.

Mais elle affronta les difficultés avec courage, et en 2020, cinq ans après l’accident, elle souligna à un journaliste local que même s’il y a encore aujourd’hui beaucoup de choses qu’elle ne peut plus faire, toute la famille s’efforce de tirer des conclusions positives de l’épreuve et des difficultés qui perdurent. 

Les parents sont bien conscients de l’exploit de leur fille. 

«Je n’arrive toujours pas à croire qu’elle ait été capable de faire ça, s’exclame Angela. Elle a grimpé 12 mètres d’une pente très raide. Elle était pieds nus. Les médecins et les pompiers ont eu besoin de cordes pour descendre et remonter…»

Une chose est certaine : sans le courage et la détermination de cette enfant de 5 ans, personne, sans doute, n’aurait découvert à temps cette voiture accidentée. Lexi mérite bien la médaille qu’elle reçut du gouverneur de la province, médaille qui n’avait jusque-là jamais été donnée à quelqu’un de si jeune.