Vous vous rappelez peut-être de votre surprise ou du regard intrigué que vous avez jeté la première fois où vous avez vu un cycliste, ne semblant pas spécialement sportif, gravir sans effort apparent une côte, et surtout avec un « tour de pédale » incroyablement efficace, tant la vitesse de déplacement du vélo était en décalage avec celle de rotation du pédalier! Pire encore si vous êtes cycliste émérite, vous rappelez-vous cette fois où votre orgueil fut piqué au vif quand cette personne d’un âge avancé vous a dépassé sans effort dans l’ascension pour laquelle vous gagniez chaque mètre au prix de mille efforts !

Vous veniez de croiser pour la première fois un VAE (comprenez un Vélo à Assistance Electrique)…

Le vélocipède : la bicyclette de 1818

La bicyclette est apparue officiellement en 1818 quand l’avocat français Louis-Joseph Diner a déposé le brevet du fameux «vélocipède» pour son client, le baron allemand Drai. C’est alors une draisienne (bicyclette sans pédales), du nom du baron Drai. Mais l’abréviation «vélo» restera par la suite pour désigner la bicyclette. Il faudra attendre plus de 40 ans pour que les pédales viennent améliorer l’engin, suite à l’invention du serrurier Pierre Michaux, au début des années 1860. Les pédales sont alors positionnées sur l’axe de la roue avant. 20 ans plus tard apparaîtra la chaîne de transmission qui permettra de déplacer le pédalier et de le loger au centre du fameux vélocipède, et ainsi de placer la selle entre les deux roues et non plus sur la roue avant, réduisant ainsi le risque de chutes dangereuses en avant: les fameux «soleils» !

L’arrivée des pneus Michelin !

Il faudra attendre la sortie de la Seconde Guerre mondiale pour qu’en 1946, le dérailleur soit inventé, permettant d’accroître nettement le confort d’utilisation de l’engin!

Mais il ne faut pas croire qu’entre-temps les inventeurs soient restés inactifs. En effet, rapidement les Anglais se sont rendu compte qu’en agrandissant la roue avant, il était possible de gagner en vitesse.

Les premières bicyclettes, qui étaient en bois, étaient très lourdes (et très chères), et les roues, en bois également, étaient cerclées de fer. Elles n’avaient évidemment pas de suspensions et le confort sur les routes non goudronnées laissait à désirer, lui valant le sobriquet de «tapecul».

Le cerclage en fer fut alors remplacé par des bandes de caoutchouc. Puis en 1875, Jules Truffaux améliora le système en dotant le vélocipède d’une armature métallique creuse grâce à des stocks de fourreaux de sabres. Il inventa aussi les rayons métalliques et les jantes creuses pour les roues.

L’engin s’allégeait notoirement, passant sous la barre des 12 kg!

Heureusement, les deux fameux frères Michelin vinrent apporter leur touche de confort à la bicyclette en la dotant de pneus à chambre à air!

Le testeur de leur invention s’en trouva fort aise puisqu’il remporta le premier Paris-Brest-Paris.

Les roues redevinrent de taille équivalente afin de garantir une meilleure stabilité…

La «bicyclette hirondelle» (en 1900) venait de poser les bases du vélo moderne. Il n’y aura plus d’évolutions fondamentales, mais seulement des améliorations et innovations techniques.

Quel siècle pour le premier vélo électrique?

Même le Vélo à Assistance Electrique n’est pas une évolution fondamentale puisque le premier «vélo électrique» a vu le jour dès… 1895! En effet, l’Américain Odgen Bolton breveta un vélo à moteur de 10 ampères doté d’une batterie de 10V dès la fin du XIXe siècle.

S’il n’a pas bénéficié d’un grand succès commercial, très tôt concurrencé par l’automobile et les motocyclettes à moteur à explosion, le vélo électrique n’a jamais disparu, et d’ingénieux fabricants en ont régulièrement produit des séries limitées.

Mais le vélo électrique ne s’installera pour de bon sur le marché que près d’un siècle plus tard, au début des années 1990, avec Giant et Yamaha.

S’il gagne depuis des parts de marché, l’engouement attendra encore près d’une trentaine d’années, avec l’augmentation des prix des carburants couplée à une poussée des mouvances écologistes.

La montée en puissance du VAE

L’arrivée en 2003 des batteries lithium permettra d’alléger le poids du vélo et d’accroître significativement son autonomie. Mais c’est à partir de 2018 que l’on constate une «explosion» des ventes (boostées par les primes et subventions versées pour l’achat d’un Vélo à Assistance Electrique). Depuis, le marché s’accroît en moyenne d’environ 25% par an dans plusieurs pays européens, dont la France. A titre d’exemple, 9700 vélos électriques étaient vendus en France en 2007, contre 77000 en 2014 (c’était déjà une croissance de 37% cette année-là !), et 660000 en 2021 (+28% par rapport à 2020)! (selon les chiffres de l’Union Sport et Cycle).

A titre de comparaison, la filière du cycle (dans son ensemble) connaissait en 2021 une croissance de 4% en volume et 15% en valeur.

Le vélo à assistance électrique détrône même le vélo «classique» (ou «à assistance musculaire» comme le surnomment certains avec humour) avec 59% du chiffre d’affaires du marché du vélo en France. Mais il est vrai que les VAE ont un prix nettement plus élevé que leurs homologues sans moteur! En volume, ils ne représenteraient «que» 28% des ventes en 2021.

1 vélo produit en France sur 2 était électrique en 2022 ?

Le prix moyen d’un VAE était d’environ 2000€ en 2021 (soit une baisse de 4% par rapport à 2020), contre moins de 400€ pour un vélo «classique», établissant ainsi un prix moyen du vélo toutes catégories confondues à 794€ (contre 300€ en 2012 quand il n’y avait presque pas de VAE).

L’engouement des Français (mais pas que) pour le vélo est donc bien réel. Et, fait intéressant pour l’industrie, le «made in France» n’est pas en reste!

En effet, ce sont quelque 800000 vélos qui ont été produits en France en 2021 contre 600000 en 2020 (+21%). Pour 2022, le chiffre n’est pas encore disponible, mais selon les premières estimations, il pourrait côtoyer le million, dont 1 sur 2 serait électrique!

Il faut dire que l’assistance électrique a gagné tous les segments du marché, du vélo urbain au VTT (Vélo Tout Terrain), en passant par le VTC (Vélo Tout Chemin), le vélo de course, le vélo cargo (vélo à 3 roues avec un genre de petite remorque sur l’avant), etc.

Le vélo de ville représente 42% des VAE, contre 27% pour les VTC, 21% pour les VTT, et 10% pour le reste.

Il est intéressant de noter que l’engouement pour la «petite reine», profite particulièrement aux commerces spécialisés puisque les détaillants totalisent 51% des ventes en volume et 71% en valeur, contre 34% des ventes en volume et 21% en valeur pour les «multisports», et 3% pour internet…

Quid de l’avenir?

Cet engouement pour le vélo devrait se poursuivre dans les années à venir selon les prévisions du secteur, poussé par des vents porteurs tels que l’écologie, le prix des carburants, les campagnes de lutte contre la sédentarité excessive, etc.

Sur ce dernier point, les débats font rage; pratiquer le vélo électrique est-il un sport? Non, disent les tenants de l’effort physique intense… Oui, et même meilleur que le vélo sans assistance car moins violent, disent les défenseur du VAE…

Thèses et antithèses sont alors développées par des «spécialistes»…

Toujours est-il qu’un bon tour de vélo, avec assistance électrique ou «musculaire», vous permettra de prendre un bon bol d’air qui sera bénéfique pour votre oxygénation!

Guillaume Keller