Frank Davies, chasseur émérite qui vint assouvir sa passion sur les terres bretonnes dans les années 1855, fut apparemment impressionné par les rochers et la densité de la forêt de Duault (Roc-Noir) dont il donne une description un peu inquiétante…

«Elle se composait d’une masse de rochers, dont quelques-uns, blocs de granite, s’érigeaient comme des géants sur leurs gardes, barrant l’accès de la forêt au-delà, tandis que d’autres, couchés, formaient des cromlec’hs et des dolmens naturels de taille gigantesque et de formes bizarres (…). C’était une forêt épaisse pendant des kilomètres, excepté quelques places déblayées par les charbonniers ou des emplacements occupés par des bouquets de hêtres qui couronnaient les hauteurs».

Il est vrai que ce vaste massif forestier, où l’Hyères prend sa source, conserve de son histoire de quoi écrire quelques légendes.

Difficile d’éviter les monuments mégalithiques qui parsèment les lieux. Petits ou parfois imposants, les menhirs, comme des navires échoués, surprennent par leur taille. La «dent de St-Servais» haute de 9 mètres est un des plus beaux de Bretagne, accompagné, un peu plus loin en lisière d’un champ, de menhirs jumeaux… L’exploitation récente du massif a mis à mal sa nature particulière.

L’on imagine bien dans un lieu si original quelques huttes en genêts destinées à abriter sabotiers ou charbonniers bien qu’ils ne fussent pas les seuls à chercher la solitude dans ces lieux retirés…

Une enquête menée en 1960 par le journaliste Yvon Charles mit en lumière l’existence d’une hutte, vieille de plus d’un siècle, nichée au cœur d’une clairière où se succédèrent trois ermites volontaires. Des deux premiers, il ne restait alors que quelques souvenirs épars, l’un vivant de pêche, de chasse et d’élevage, tandis que le deuxième laisse le souvenir d’un apiculteur d’exception, qui mourut à un âge canonique.

Le dernier de ces ermites volontaires, qui en 1960 occupa à son tour les lieux, était arrivé au cours de la dernière guerre ne laissant rien connaître de son histoire. Il vécut là, ne fréquentant personne, si ce n’est pour vendre les peaux de quelques animaux sauvages ou les paniers qu’il fabriquait en osier durant les frimas de l’hiver. 

C’est une blessure qui lui fit quitter son refuge pour l’hôpital où il s’éteignit sans doute loin du havre de paix qu’il s’était approprié, emportant avec lui son histoire. Il fut vraisemblablement le dernier ermite de la forêt de Duault, qui seule garde le souvenir de ces hommes en quête d’un autre idéal.