«Ah ! ces traditions et ces habitudes !»
Que de fois cette exclamation a laissé percevoir sinon l’agacement, du moins la lassitude de l’un ou de l’autre !
De fait, les traditions et habitudes sont loin d’être toutes utiles ou simplement justifiées ! Et pourtant elles s’imposent bien plus que nous le pensons…
Carcans ou points de repère, elles sont présentes dans le quotidien de notre existence… même chez ceux qui s’en défendent.
On comprend donc l’irritation de ce jeune haut fonctionnaire romain d’il y a quelque 2000 ans… et beaucoup de nos contemporains y feraient aisément écho :
«…Je ne comprendrai jamais comment nous avons été amenés à juger bon de nous lever quand il fait encore nuit.
A mon avis c’est le désagrément de la chose qui pousse les moralistes à y trouver de la vertu.
Ils parlent toujours avec éloge de celui qui commence à travailler dès «l’aube grise» comme si c’était supérieur à un beau ciel bleu matinal.
… Les sénateurs, les prêteurs et les consuls se lèvent alors qu’ils voient à peine pour s’habiller et se sentent infiniment plus vertueux que ceux qui préfèrent commencer leur journée quand ils sont suffisamment réveillés…»
(John Maddox)
Cet humour teinté d’irritation n’accrédite cependant ni paresse ni laxisme !
L’étonnement de ce Romain des temps anciens, de cette Rome si organisée, militairement, administrativement, socialement… révèle une forme de refus du «panurgisme», de subir un état de fait qui impose un mode de vie, et influe considérablement sur son existence, et l’hypothèque peut-être !
Et nous, gens du XXIe siècle…
Quand des enfants, alors que la nuit de l’automne ou de l’hiver étend encore son voile sombre, doivent se lever… se préparer…, gagner l’endroit où «le bus scolaire» va les prendre pour les amener à telle ou telle école, primaire, collège… ou même maternelle…,
est-ce vraiment une saine et belle habitude, une vivifiante et formatrice tradition ?
Et le déroulement de leur journée, de leur année scolaire… de leurs études… est-il sage, adapté aux différents âges, aux objectifs définis ou supposés l’être ?
Qu’en est-il de leur épanouissement personnel ?
Il vous suffirait de méditer quelque peu pour découvrir, en divers domaines, dans les modes de vie, les règles et règlements, les usages, les traditions et autres rites… d’étonnantes réalités qui régissent les manières de travailler, de se vêtir, de se déplacer…, les places dans la société… et jusqu’à nos loisirs…
Il ne s’agit pas de tout dénigrer… de tout remettre en question.
Il est de nombreux usages et réglementations, de nombreux interdits et lois…, qui sont le fruit de la réflexion et de la sagesse séculaires… et ont donc leur raison d’être.
On ne peut vivre en société, et même en famille, ou seul, sans un minimum de conventions à respecter…
L’anarchie engendre le chaos ! et la vie de tous, tôt ou tard en est affectée, et particulièrement celle des plus faibles…
Cependant l’être humain, à tout âge, a besoin de comprendre, de se situer… pour participer pleinement et s’accomplir…
La routine dont le sens s’en est allé, les contraintes sans explication…, ne sont certes pas aussi dommageables et asservissantes que les dictatures de tous ordres… mais en ôtant à l’homme la possibilité de créer, d’entreprendre, de choisir… elles rabougrissent sa vie éphémère.
Tout ce qui nous vient du passé n’est pas obligatoirement bon ou mauvais !
L’essentiel est de pouvoir tout examiner ou réexaminer et se déterminer en connaissance de cause.
Un exemple :
«le savoir-vivre» si prisé dans certains milieux et tout particulièrement à certaines époques, peut devenir désagréable et contraignant dans ses excès… provoquant alors révolte ou hypocrisie.
Régentant jusqu’aux détails du comportement, il peut sombrer dans l’absurde ou le ridicule. «Le Bourgeois Gentilhomme» et Molière l’ont bien mis en évidence.
Il n’est parfois que l’expression fate et orgueilleuse de gens qui se veulent «du même monde»…
Cependant, sans un minimum de règles, la vie ensemble peut-elle se concevoir ?
«Les précieuses ridicules», le pédantisme d’aristocrates enfermés dans leurs illusions, et les artifices de «leur étiquette», tout comme l’extrême sévérité des collèges jésuites et leur férule… ne légitiment pas le laisser-aller, l’absence de l’élémentaire politesse, voire la conduite rustre de trop de jeunes et moins jeunes aujourd’hui.
Et cela même si ce «vernis» affecté est souvent difficile à supporter !
Sourions toutefois en nous souvenant du trait acéré de cet habitué des salons, alors que, avec onctuosité il s’exclame :
«Oh! Chère madame, que vous êtes belle…»
Réponse acerbe de la dame :
«Je ne peux pas en dire autant de vous».
Et… «revers foudroyant» de l’homme :
«Faites comme moi : mentez !»
Finalement, la conclusion d’un observateur attentif de la tragi-comédie humaine semble de bon sens :
«Le savoir-vivre est difficile à définir ! Mais quand il manque, on le sait !»
L’homme étant par nature un être grégaire, nous sommes enclins à imiter, consciemment ou non, ce qui se vit, «se fait» autour de nous… ou ce dont nous avons hérité !
et à subir ainsi nombre d’habitudes, de codifications, de modes et de mœurs… qui peuvent altérer notre personnalité et notre vie !
Que d’actes répétitifs qui encombrent notre existence et n’ont pas d’utilité réelle ou de sens!
Là encore, l’homme responsable et libre saura réévaluer ses réflexes et comportements pour n’être asservi en rien.
Alors, de l’héritage du passé, des us et coutumes actuels… examinons toutes choses et retenons ce qui est bon, ainsi que le souligne la Bible.
Et comme nous citons la Bible, retenons également l’invite de St Paul, qui révèle avoir appris à «se faire tout à tous», à vivre au milieu des Grecs, des Romains, des Juifs, de divers peuples… de manière à ne pas les choquer, non pas tel un caméléon, mais en homme qui veut aussi écouter et comprendre les autres et user de convivialité avec tous.
Un très bon enseignement à une époque où «le chacun pour soi», «le repli identitaire»… sont facteurs de problèmes et d’incompréhensions.