«Aux yeux des géographes de l’Europe entière, la Bretagne représente la région bocagère typique. A elle se rapportent les comparaisons, d’elle on tire les exemples.»

55 ans ont passé depuis la parution de cet extrait d’article dans la revue Penn Ar Bed rédigé par le géographe André Meynier, 55 années où les haies et talus de Bretagne n’ont eu de cesse de rassembler et diviser les uns et les autres dans un mélange d’enjeux économiques, de productivité, de primes européennes et de maintien d’un environnement naturel préservant l’équilibre naturel des paysages.

Gilles Servat, ardent défenseur de la Bretagne, dénonçait avec poésie dans l’une de ses chansons «Madame la colline» l’eau qui s’enfuit des prairies que le vent dessèche…

Il est vrai que les talus en Bretagne, héritage très ancien, remontant à l’époque médiévale, étaient trop nombreux. Ils clôturaient parfois des champs de quelques mètres de large, et leur suppression a permis aux paysans bretons de gagner de précieux hectares. Mais ces talus avaient aussi leur rôle, dont beaucoup se sont affranchis à leurs dépens, rappelés à l’ordre par quelques violents orages et coups de vent. 

Le bourg de St-Hernin en a été la première victime le 9 mai dernier lors d’un violent orage. La terre de plusieurs champs, récemment ensemencés, emportée par la pluie, a inondé et souillé plusieurs habitations et commerces, plaçant la commune en état de catastrophe naturelle. Le maire, Mme Marie-Christine Jaouen, a saisi cette occasion pour rappeler le rôle essentiel des talus freinant le ruissellement des pluies. 

Un vaste programme mené par Breizh Bocage et soutenu par la Région Bretagne a été mis en place pour reconstituer un maillage bocager efficace où les talus joueront un rôle essentiel face aux aléas climatiques (érosion des sols, atténuation des inondations, recharge des nappes souterraines, brise-vent…).

Plusieurs agriculteurs ont d’ores et déjà profité de ces aides. Une autre étude commencée cet été doit évaluer la qualité des haies et talus sur 15 000 points d’observation en Bretagne (hauteur, densité, âge, environnement, plantations). Cet outil d’évaluation permettra de comparer les résultats avec ceux de 2008. 

«220 000 kilomètres de linéaire bocager ont été rasés entre 1964 et 1994, on a payé pour détruire, maintenant on paie pour reconstruire» déclarait un technicien du syndicat des bassins versants. Il y a sans aucun doute un sage équilibre à trouver dans le Poher, surnommé l’Argoat (le pays des bois), ne l’oublions pas.