«… Le pouvoir use les hommes… et toujours on en vient à détester le maître qu’on s’est donné…

Je n’ai pas d’ambition et un empereur se doit forcément d’être ambitieux, au moins pour son peuple.

J’aime la paix et le gouvernement est un carcan.

J’aspire à être aimé et je serai forcément haï.

Alors qu’ai-je à faire de la pourpre? Laissons-la à d’autres…»

Ces paroles et réflexions sont prêtées à Vespasien par R. Bourgeon dans son livre «Le fils de Ben Hur».

Vespasien, empereur romain, fut un réformateur.

Il menait une vie simple, et semble avoir voulu mettre en pratique les pensées qu’il croyait justes…

Quoi qu’il en soit, les propos qui nous sont rapportés méritent, même quelque vingt siècles plus tard, d’être écoutés…

L’Histoire a souvent prouvé leur pertinence et leur sagesse.

Ils peuvent inspirer «les grands» de ce monde chaotique et changeant, mais aussi les hommes et femmes occupant des postes divers, ou ceux qui les convoitent.

«Le pouvoir use les hommes» et pourtant rares sont ceux qui, ayant réussi à en obtenir quelques parcelles ou miettes, tant au niveau national, international que local, ne désirent pas ardemment poursuivre dans ces voies, qu’ils s’imaginent avoir un «destin» ou qu’ils soient poussés par leur seule ambition.

Faut-il accréditer la très pessimiste conclusion que «toujours on en vient à détester le maître que l’on s’est donné»?

Que ne soient pas aimés, voire que soient haïs les dictateurs et autres princes et rois, qui règnent sans avoir jamais été mandatés… cela peut se concevoir… mais qu’il en soit de même pour «le maître que l’on s’est donné» paraît plus étonnant, à moins, bien évidemment, que ce personnage «devenu chef, président, maître, responsable…» n’abuse de son autorité et de ses prérogatives…

En régime démocratique authentique, les élections régulières permettent d’y remédier, cependant l’interpellation de Vespasien devrait être reçue et méditée par chacun.

Tous ou presque, à moins de vivre en ermite, nous avons, au sein de la famille, dans les divers emplois, dans la société comme dans les autres domaines d’activités, qu’ils soient sportifs ou autres, des occasions de manifester une certaine autorité, même si on la pare du terme de «responsabilité», moins contraignant.

Certes il est nécessaire d’assurer avec efficacité la fonction qui nous est attribuée, mais la manière de le faire est primordiale.

Tel ou telle sera bien accepté, voire aimé, tandis que tel ou telle, dans la même situation sera critiqué, contesté, voire vilipendé.

La façon d’aborder les autres, en tous lieux et en toutes circonstances, est essentielle.

Les relations humaines demandent, voire exigent, le respect de l’autre quel qu’il soit, du plus modeste au plus titré… et ceci sans flagornerie, ni faiblesse hypothéquante.

Alors que se vit la rentrée, dans ce monde troublé et sans repères du XXIe siècle, les paroles de Vespasien pourraient être utilement rappelées.

Il est des «maîtres» qui ont marqué, pour la vie entière, des générations d’élèves… et ces maîtres et maîtresses (professeurs des écoles maintenant), ont été et demeurent aimés de ceux auprès desquels ils ont rempli leur mission.

Cela est également vrai pour des chefs en diverses disciplines dont on se souvient avec parfois une certaine émotion.

Non ! «le maître» ne sera pas inéluctablement haï…

Si, quel que soit le travail à exécuter, les ordres et directives sont toujours appropriés et accompagnés d’un réel respect des subordonnés, les relations à l’intérieur comme à l’extérieur du groupe seront bonnes.

Il est une autre dimension que la Bible révèle, qui transforme et transcende les contacts humains: celle du cœur.

«Aime ton prochain comme toi-même» a exhorté Jésus, le Christ.

C’est la voie de l’Évangile, il n’en est pas de plus élevée, ni de plus noble.

Yvon Charles